Quelles menaces planent sur les tortues en Martinique ?
Les tortues sont susceptibles de se déplacer, parfois sur de grandes distances. Certains traceurs GPS ont été installés sur les carapaces et permettent de mieux connaître leurs déplacements. Les menaces qui pèsent ailleurs dans le monde génèrent donc des répercussions directes sur les tortues que nous observons en Martinique.
« L’effet cocktail » : la combinaison de multiples menaces différentes
S’il n’y avait qu’un seul problème, la situation serait plus simple, mais en fait les différentes menaces s’additionnent les unes aux autres, créant une accumulation de difficultés.
Nos tortues figurent sur les listes rouges de l’UICN
La tortue verte est classée comme « en danger », la tortue imbriquée « en danger critique d’extinction » et la tortue luth parmi les espèces « vulnérables ». Les données scientifiques sont inquiétantes, et ce de plus en plus au fil des années. Cela signifie que ces trois espèces présentent un risque d’extinction, et également que les données sont suffisamment établies pour en être sûrs.
La surpêche, principale menace pour nos tortues
La diminution des populations de tortues est en phase avec l’essor de la pêche sur leurs zones d’alimentation et de reproduction. Prise dans les filets, les tortues meurent étouffées. La blessure est possible au niveau des pattes notamment, mais généralement le plus grave est qu’elle soit décédée asphyxiée lorsque le chalutier va remonter son filet : trop tard.
Lorsque l’on sait que la consommation de viande participe à l’appauvrissement de la vie marine (40% des poissons pêchés servant à l’alimentation des animaux et poissons d’élevage), il paraît logique que de plus en plus de personnes limitent leur consommation de viande et de poisson, voire passent végétariens.
Certains travaux sont en cours pour enregistrer des cris de tortues en détresse prises dans des filets, et installer des émetteurs de son sur certains bateaux de pêche, aux alentours de la Guyane notamment. L’idée étant que ce son incite les tortues à se tenir éloignées des filets. Une goutte d’eau dans l’océan, mais une bonne goutte d’eau malgré tout !
Une eau trop acide provoque chez les coraux et chez de nombreux animaux marins des problèmes de calcification de leur exosquelette : cela détériore l’habitat et les possibilités d’alimentation de nos tortues.
De plus, le sexe des tortues est défini en fonction des conditions d’éclosion. Lorsque la température dépasse un certain seuil, généralement autour de 31°C, c’est une femelle qui sort de l’œuf. Il y a donc de plus en plus rarement de mâles. Or la diversité génétique est indispensable à la survie de l’espace et essentielle au maintien de ses capacités d’adaptation dans un environnement de plus en plus menaçant.
Si vous aimez profiter d’une plage de sable blanc et fin, pour poser votre serviette et vous détendre, n’hésitez pas à vous rendre aux Salines. Le rivage est grand et long, s’étirant sur 3 kilomètres : vous ne serez donc pas les uns sur les autres. La plage est bordée de mancenilliers et de poiriers pays. Quelques cocotiers ont été ajoutés depuis les années 1950. Vous trouverez sur place de nombreux snacks si besoin et divers vendeurs de souvenirs : c’est une plage plutôt fréquentée, un peu trop à mon goût car je préfère les endroits plus sauvages ! Deux autres plages en Martinique sont connues pour leur sable fin et ces eaux cristallines : la Pointe Marin proche du Club Med où de nombreux sports nautiques sont proposés, et l’Anse Grosse Roche au Cap Macré en beaucoup plus sauvage et préservé. Certains apprécieront de marcher à plat pour aller jusqu’à la savane des pétrifications en passant par la trace des caps, le Cap Chevalier et l’Anse Michel : la Martinique étant volcanique, il y a assez peu de randonnées sans dénivelé comme celle-là ! Et les paysages sont lunaires, rien à voir avec la verdure de la forêt tropicale ! En repartant, nous vous conseillons d’arpenter le village de Sainte Anne, avec son petit marché : un village de charme à mon sens, qui a su garder un certain cachet !
Nos récifs coralliens sont en difficulté, entre la surpêche, les plaisanciers qui jettent leurs ancres sur les récifs (ce n’est pas illégal, mais il n’est pas illégal d’être intelligent !), l’acidification des océans, le réchauffement. Il y a donc moins d’aliments pour les tortues sur nos récifs.
Quant à nos herbiers, l’herbe à tortue est menacée par une espèce invasive, Halophila stipulacea, qui a pris un essor important au fil des années sur nos côtes. Si l’expansion semble aujourd’hui s’être stabilisée sur le territoire, la surface colonisée par cette espèce invasive est considérable. Cette espèce est également comestible pour les tortues vertes, mais elle est moins nutritive.
Lorsque l’on regarde la Martinique vue du ciel la nuit et la Dominique, on prend conscience de l’étendue du problème. Sans parler du désastre climatique lié à l’émission de CO2 pour générer de l’électricité pour illuminer nos routes toutes la nuit (notre électricité étant majoritairement à base de pétrole en Martinique), c’est un souci pour les tortues car les mamans sont désorientées lorsqu’elles viennent pondre sur nos plages, et surtout les juvéniles peuvent être perturbés lors des éclosions et ne jamais retrouver le rivage. Est-ce vraiment nécessaire et raisonnable d’illuminer autant de routes et durant toute la durée de nos nuits ?
L’érosion des plages est un phénomène naturel : chaque année en Martinique la mer gagne environ 1 mètre en moyenne sur le littoral. Certaines plages ont ainsi perdu 120m de large alors qu’elles en mesuraient 150m au XVIIIème et au XIXème siècle (d’après les écrits du Père Labats ou de Du Tertre par exemple). Ce phénomène est fortement accentué par les activités humaines : prélèvement de sable, recul des mangroves pour y installer des entreprises ou des habitations. Il est également aggravé par le réchauffement climatique qui génère une dilatation des océans et par conséquent une montée des eaux, estimée par le GIEC à environ +38 cm d’ici la fin du XXIème siècle en Martinique (hypothèse optimiste), ce qui signifie la perte d’une cinquantaine de kilomètres carrés.
Sans plage, où nos tortues pourront-elles pondre ?
Nos aînés mangeaient régulièrement de la chair de tortue lors des réunions de famille en Martinique, mais cette pratique culturelle a fort heureusement disparu. Je pense qu’il est essentiel de ne pas méjuger cette pratique : les connaissances de l’époque n’étaient pas celles d’aujourd’hui, et l’évolution est très positive, à féliciter.
A Sainte Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines et à Grenade, la pêche et la consommation de tortues ne sont pas interdites malheureusement, sauf quelques mois dans l’année pendant la saison de reproduction. Les œufs sont également consommés. On peut trouver des épices « spécial tortues » au supermarché. J’espère que cette situation évoluera dans les années à venir.
Ne nous félicitons pas trop malgré tout, en Martinique on maintient une autorisation de pêche à la langouste l’été pendant la saison de reproduction alors que c’est interdit chez eux, et l’on trouve du poisson perroquet dans les rayons congelés de quasiment tous les supermarchés, alors que c’est une aberration écologique et que c’est également interdit dans les îles plus au Sud de la Martinique.
Le trafic d’œufs de tortues a pris un essor considérable en Guyane au cours des dernières années. L’ONG PASO Pacifico a même mis au point de faux œufs avec GPS pour tracer les braconniers.
Si par malchance vous observez une tortue en difficulté, blessée, ou décédée, en Martinique il y a toute une organisation en place pour leur venir en aide lorsque cela est possible, et autopsier les tortues décédées pour mieux comprendre les difficultés qu’elles ont pu rencontrer. Ne les manipulez pas vous-même, vous n’êtes pas formés pour cela !
Le Réseau Echouage Tortues Marines de Martinique (RETOM) est quant à lui tout à fait prêt pour intervenir, avec les compétences, les autorisations et le matériel nécessaire ! Son numéro le +596 696 234 235
La réalité n’est pas très joyeuse, et nous avons malheureusement de bonnes raisons de nous inquiéter de l’avenir de ces espèces, dont certaines étaient là avant même les dinosaures. Les tortues marines existent depuis plus de 150 millions d’années. Survivront-elles à nos comportements égoïstes ?
En tout cas, il existe de nombreuses actions possibles pour agir en faveur de la préservation et la conservation de ces animaux passionnants : n’hésitez pas à vous impliquer vous aussi.
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