Le lambi : une espèce à admirer et préserver
Le lambi est un animal emblématique des Antilles, de la famille des gastéropodes (comme l’escargot !). L’espèce la plus grosse présente aux Antilles est le lambi géant (lobatus gigas), dont la coquille peut atteindre 30 cm.
S’extasier des multiples usages du lambi
Cet animal rend de nombreux services à son écosystème du fait de son alimentation principalement herbivore et détritivore : un véritable éboueur pour les débris végétaux et autres déchets naturels, y compris les fameuses sargasses !
L’homme a de multiples usages de ce mollusque marin, le plus connu étant la dégustation de sa chair, le plus souvent en fricassée. Il était déjà consommé du temps des Amérindiens, d’où un ancrage culturel et historique fort aux Antilles.
Sa conque (le coquillage) sert également à faire du bruit pour signaler le retour des pêcheurs professionnels et par conséquent la possibilité d’acheter son poisson frais sur leurs étals, à décorer des tombes (de pêcheurs notamment), et à délimiter des jardins.
Cette porcelaine sert également d’instrument de musique (y compris lors du carnaval), voire de luminaire ou d’objet décoratif et artistique, comme au rond-point du bourg des Anses d’Arlet.
Admirer des lambis dans leur milieu naturel
Le lambi vit dans une conque, sorte de grand coquillage aux couleurs splendides : principalement rose, pêche et beige. Ce dernier peut peser jusque 3 kilos, avec un large pavillon évasé. Le mollusque en tant que tel peut peser jusqu’à 1,5 kilos.
Il apprécie particulièrement les herbiers marins, notamment celui du bourg des Anses d’Arlet où nous en observons régulièrement. Nous l’admirons régulièrement sur les récifs coralliens sur lesquels nous faisons de la plongée bouteille, par exemple entre la Pointe Lézarde et la Pointe Burgos.
Une femelle sexuellement mature (âgée de 4 ans et plus) produit entre 6 et 25 pontes par an, soit environ 20 millions d’œufs par an. Seulement une vingtaine d’entre eux atteindront l’âge adulte : la dure loi de la nature !
Une ponte de lambi dure en moyenne 24 à 36h, entre 300 000 et 1,5 million d’œufs étant pondu par la femelle, ces derniers pouvant être fécondés par plusieurs mâles. Ils constituent un long filament gélatineux de 30m de longueur pour 10 à 15 cm de diamètre, qui peut dériver sur plusieurs centaines de kilomètres.
La première année de vie, les juvéniles vont s’enfouir dans le sédiment à faible profondeur, et en sortir pour s’alimenter la nuit. Ils mesurent alors entre 5 et 10 centimètres et sont consommés par les langoustes, les poulpes, d’autres gastéropodes, les poissons, les crabes, ou les bernards l’ermite.
Ensuite, les jeunes lambis vont coloniser des herbiers marins peu profonds. Pour diminuer la pression des prédateurs naturels, ils se regroupent généralement sur une même zone, formant un agrégat de lambis (un « nid » comme disent nos amis grenadiens) : une aubaine pour les pêcheurs !
La maturité sexuelle est atteinte à partir de 4 ans, avec une taille d’environ 18 cm. A partir de là, pêche mise à part, seules les poules, les raies et certaines espèces de tortues constituent une menace pour eux. La tortue caouane est capable de briser la conque du lambi à l’aide de ses mâchoires massives. Quant au poulpe, il peut introduire sa langue dans la coquille et y libérer une neurotoxine paralysante.
L’espérance de vie de ce mollusque varie de 6-7 ans en eau peu profonde, mais cela peut aller jusqu’à 26 ans en eau profonde de 40 à 100 m.
Au fil du temps nous avons l’habitude de saluer les collègues croisés lors de nos sorties catamaran en soufflant dans nos lambis respectifs. C’est sympa, écologique, ludique et culturel pour ceux qui ne connaissent pas cet instrument de musique !
Si nous sommes désormais capables de faire plusieurs belles notes, des musiciens atteignent un niveau que nous sommes loin d’égaler !
Conscient de l’effondrement de la ressource, le Comité Régional des Pêches Maritimes et des Élevages Marins des îles de Guadeloupe, au titre de ses compétences, a proposé au préfet d’interdire depuis 2020 la pêche et la vente de ce mollusque en Guadeloupe. D’octobre 2021 à janvier 2022, la pêche professionnelle (apnée et trémail) et la vente ont été de nouveau autorisées pour 4 mois, et pour la saison en cours, l’autorisation a seulement été donnée pour 2 mois.
En Martinique en revanche, à ce jour, la pêche reste autorisée 6 mois par an, entre le 1er juillet et le 31 décembre, les pêcheurs loisirs étant limités à 3 prises par jour. Toute pêche doit être débarquée entière, sans découpe préalable du lambi, de manière à pouvoir en contrôler les mesures.
La demande intérieure est bien supérieure à la production en Martinique. Résultat, des lambis sont importés illégalement d’autres îles de la Caraïbe, notamment Union aux Grenadines. Nous avons pu constater des « montagnes » de conques de lambi grossissant à vue d’œil à Union, avec un export par barque rapide pour fournir les restaurants des îles françaises (go fast).
Les douanes essaient de limiter les dégâts de ce trafic en contrôlant les navires, et également en réalisant de vastes opérations de contrôle de la provenance des lambis utilisés par les restaurateurs. En revanche les consom’acteurs sont encore peu sensibilisés au sujet, notamment parmi les touristes.
Lorsque nous séjournons à Grenade où la prévalence du lambi est importante, nous préparons et consommons occasionnellement du lambi. C’est un long processus que d’apprendre à préparer l’animal : réussir à le sortir de sa conque, enlever les parties non comestibles de l’animal, attendrir puis préparer la viande.
En Martinique nous avons fait le choix de ne plus en pêcher ni en manger, pour ne pas rajouter de pression sur une espèce en difficulté et ne pas participer passivement aux trafics. Cela nous semble aussi aberrant que de consommer du poisson perroquet, ce beau jardinier de nos récifs coralliens. Vous trouverez malgré tout du lambi à la carte de nombreux restaurants, mais personnellement, je ne peux que vous recommander de déguster d’autres plats : la gastronomie de Martinique est tellement riche de saveurs !
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