Family lifestyle
Février 2022
Mathilde, Maman du blog Trois Chatons en Vadrouille nous a contactés pour un interview présentant le style de vie de notre famille. Elle est partie du point de vue qu’il y a peu de familles itinérantes, que l’on croise souvent des jeunes, des couples, ou des retraités sur des modes de vie insolites, mais beaucoup moins les familles. Elle cherche donc à mettre en lumière des situations “atypiques” comme la nôtre, en se disant que cela peut aussi inspirer d’autres familles à trouver leurs propres choix et leurs propres rythmes !
Je me suis laissée prendre au jeu et ai répondu à ses questions, que j’ai trouvé très qualitatives et pertinentes : voilà mon interview !
Présentez-vous, votre famille et votre mode de vie :
Bonjour, je m’appelle Chloé et je vis depuis 6 ans sur mon catamaran avec mon mari et mes 2 enfants de 9 et 11 ans.
Après l’achat de notre voilier, nous avons initialement travaillé 2 années au niveau de la réserve naturelle de Port-Cros / Porquerolles sur des journées dédiées à la plongée durant la saison estivale. L’hiver était alors plus envisagé comme un temps privilégié pour notre famille ainsi que pour l’entretien de notre bateau dans des régions plus chaudes comme la Corse ou encore Carthagène en Espagne, en passant par les Baléares. Avant cette transition, chaque année, nous sortions le bateau de l’eau à l’aire de carénage de Cannes afin de refaire nos peintures sur les coques.
Au bout de 2 années méditerranéennes, le goût de l’aventure nous a amené à traverser l’Atlantique avec pour destination notre belle île de la Martinique. Nous avons alors eu l’occasion de visiter beaucoup de pays différents sur notre route comme Gibraltar, les Canaries ou encore le Cap-Vert. Notre vie est depuis 4 ans partagée entre une vie hivernale en Martinique où nous travaillons dans le milieu de la plongée et une saison cyclonique où nous partons nous réfugier dans les îles plus au Sud (Sainte-Lucie, Saint-Vincent, les Grenadines, Grenade, etc.). Notre saison de travail en Martinique s’étend d’octobre à juin.
Depuis quand menez-vous cette vie ? Qu’est-ce qui vous a amené à cette vie-là ?
Cela fait maintenant 6 ans que nous vivons en voilier. Mon mari et moi aimions nos métiers précédents, Olivier était dans l’armée et je travaillais comme consultante en stratégie et management… Mais c’était très prenant, et nous avions profondément envie d’avoir du temps pour vivre en famille et voir grandir nos enfants ! Je ne pouvais pas imaginer me dire « ah mince, c’est passé si vite, je n’ai pas vu passer leur enfance et maintenant ils sont partis de la maison… ».
Racontez-nous votre hébergement !
Notre catamaran fait 50 pieds, c’est-à-dire une quinzaine de mètres. C’est très spacieux : il comprend 4 chambres doubles, un lit d’appoint, deux salles de bain, 3 WC. Concrètement, nous avons 11 pièces ! Nous en sommes propriétaires.
Nous avons un fonctionnement autonome en eau et en électricité. Nous dessalinisons l’eau de mer pour avoir de l’eau douce, ce qui nous rend bien plus économe que les familles vivant à terre. Côté électricité, nous avons 1400 watts de panneaux solaires et de bonnes batteries : c’est beaucoup ! Cela permet d’alimenter nos lampes, nos pompes, le matériel de navigation (pilote automatique notamment), et aussi tout notre électroménager : machine à café, lave-vaisselle, frigo, lave-linge, congélateur… En revanche nous faisons attention aux horaires : on ne lancerait pas un lave-vaisselle le soir quand le soleil est couché par exemple. Et nous sommes vigilants à limiter nos consommations énergétiques : interdiction par exemple de laisser ouvert longuement le frigo quand nous avons besoin de quelque chose.
Nous vivons toute l’année dans les mouillages, jamais dans les ports. Il faut donc une annexe (un zodiac) pour rejoindre la terre. Lorsque je fais mes courses, elles transitent par l’annexe. Nous avons une seule annexe pour nous quatre, mais en cas de besoin il peut nous arriver d’utiliser le paddle pour rejoindre la terre.
Quels métiers exercez-vous ?
Cette question n’est pas si simple qu’elle en a l’air !
Le cœur de notre activité, ce sont des journées en catamaran avec snorkeling, paddles, tortues et BBQ à bord. Cela implique pour mon mari et moi-même d’être tous les deux moniteurs de plongée et de snorkeling. Nous sommes également déclarés restaurant, avec la licence grande restauration pour la vente d’alcool avec les repas.
Les gens interprètent souvent le quotidien mon métier comme le fait de passer mon temps sous l’eau avec mes bouteilles de plongée. C’est très éloigné de ma réalité ! De fait, il peut m’arriver de passer un mois entier sans aller plonger, car c’est surtout mon mari qui plonge, et aussi un second moniteur quand on a besoin de renforts. Je ne suis pas au chômage technique pour autant, je vais préparer à manger pour une dizaine de personnes, faire les factures, les déclarations de TVA, recevoir les appels clients, répondre aux mails, gérer les réservations, m’occuper du briefing du matin pour la plongée, donner à tous des palmes, masques, combinaisons, les équiper avec des plombs et cadencer la matinée pour que ceux qui souhaitent faire un baptême soient prêts au moment où leur moniteur ressort du baptême précédent… L’après-midi je mets les paddles à l’eau, et je les conseille parfois car la majorité d’entre nous commence par prendre la pagaie à l’envers ! J’échange aussi beaucoup avec mes clients, parfois sur la vie en général ou leurs métiers, parfois sur la faune et la flore sous-marine, les poissons qu’ils ont pu admirer. Le soir je vais m’occuper de finaliser des travaux administratifs de notre société, par exemple envoyer un bon cadeau, répondre à un avis client, scanner des factures, transmettre un justificatif d’assurance à un partenaire, ou alors partir faire les courses. Dans ce cas-là je rentre tard, avec deux caddies complets à ranger dans le bateau. Ça me fait des bonnes journées !
A côté de cela, depuis deux ans nous avons acheté un second bateau, qui sert d’hébergement insolite au mouillage. C’est mon mari qui gère le voilier et accueille les clients à bord. A mon niveau je commercialise le bateau, gère le marketing, les appels clients, les réservations, les encaissements. Et depuis quelques mois nous avons acheté un appartement mis en location saisonnière, sur le même modèle de répartition des rôles entre mon mari et moi-même.
Pour être tout à fait complet sur la question de mon métier, si vous n’êtes pas trop fatigués de me lire, j’ai aussi repris depuis un an à temps partiel mon ancien métier, que j’exerçais avant de vivre en catamaran. J’ai donc repris quelques missions de consulting, sur des animations de séminaire, des diagnostics stratégiques et organisationnels, de la conduite du changement auprès d’équipes. Mes clients sont soit en Martinique & Guadeloupe, soit pour les séminaires en distanciel auprès de clients basés en métropole.
Cette semaine, l’un de mes clients bien détendu par une belle journée à bord avec plongée me disait « Vous avez vraiment un rythme super cool, c’est chouette… ». Je me suis dit qu’il avait vu de belles tortues mais n’avait pas bien compris la réalité de mes journées, surtout ces derniers mois !
Comment vos enfants vivent-ils cette vie ? Est-ce que ce mode de vie leur convient ?
Nos enfants sont très épanouis dans ce mode de vie, c’est un plaisir que d’entendre leurs éclats de rire ou les voir passer tant de bons moments ! Quand nous avons des clients à bord, le matin ils gèrent leur école puis ils prennent du bon temps, par exemple en jouant avec leurs lego, en prenant un jeu de société ou en lisant sur leurs liseuses.
Quand ils font correctement leur école, ils ont le droit de faire chacun 15 minutes de jeu sur ordinateur. L’après-midi ils passent généralement du temps dans l’eau à faire des batailles de paddle, montrer des étoiles de mer, pagayer pour faire faire une petite promenade à un ou deux client(s), sauter dans l’eau et remonter à l’échelle de corde.
Pendant le dernier confinement, j’ai pris beaucoup de photos sous-marine en plongeant avec eux et nous avons concocté ensemble des petits quizz sur la faune et la flore sous-marine, comme celui des espèces les plus fréquentes ou bien celui plus ludique des devinettes pour trouver les noms des poissons.
Le soir et les jours sans clients nous avons davantage de temps pour nous. On aime bien aller passer notre soirée à terre après une journée de travail, ça nous change ! Par ailleurs, les enfants suivent chaque semaine des cours de golf, et pendant les vacances ils font souvent des stages (de cirque, de cheval ou autre).
Nous participons régulièrement à des sorties pédagogiques organisées avec d’autres familles en école à la maison (c’est souvent moi qui organise, mais de plus en plus d’autres familles se mettent à proposer des activités, c’est chouette !).
Nous sortons aussi « pour le fun », que ça soit en faisant des randonnées, en étant invité chez des amis ou à un anniversaire, en allant à un parc de jeu ou ailleurs, comme beaucoup de familles avec une vie plus « classique » ! Si on se déplaçait tout le temps de baie, ils auraient moins le temps de sympathiser mais là nous sommes posés en Martinique depuis un peu plus de 4 ans, sauf en saison cyclonique où nous descendons nous abriter plus au Sud !
Racontez-nous l’école et vos enfants ! Est-ce qu’ils sont bons élèves à l’école ? Est-ce qu’ils aiment l’école ? (Selon votre situation : Est-ce qu’ils aiment avoir plusieurs écoles ? Est-ce qu’ils aiment que vous leur fassiez-vous-même l’école ? Qu’est-ce qu’ils préfèrent/détestent/voudraient modifier ?)
L’école est la partie la plus complexe de notre vie de famille, celle qui nous occasionne le plus de conflits. Disons-le tout de suite, ça n’est pas facile tous les jours ! Nous avons des périodes où c’est très fluide, et d’autres… beaucoup moins, comme ces dernières semaines !
Nos enfants sont ravis de faire l’école à la maison et pas à l’école, principalement parce que ça leur laisse plein de temps libre pour jouer et profiter de la vie. Ils ne sont pas fan du travail scolaire, même s’ils en comprennent bien la nécessité et que parfois nous passons de bons moments à faire école.
Nous faisons école de façon formelle une heure par jour, tous les matins y compris le week-end et les vacances scolaires. Si les enfants n’ont pas travaillé de façon concentrée, cela peut leur prendre un peu plus de temps. Ils travaillent sur le programme scolaire.
Je rajoute en plus de nombreuses sessions « hors programme », plus ludiques et sur divers supports de mon choix (géographie, histoire, littérature, politique, économie, sciences, etc.). C’est l’occasion souvent de bons moments et c’est plus diversifié, nous avons fait la fresque du climat enfant, écouté des podcasts sur la mise en place du chemin de fer ou l’essor du libéralisme, joué à rassembler des homophones avec leurs définitions respectives, fabriqué une île imaginaire…
Du haut de ses 11 ans, mon aîné est bien conscient de l’utilité et la nécessité de faire école, en revanche il a très souvent la flemme. C’est un partisan du moindre effort, et du coup il est parfois nécessaire de le sanctionner quand il n’a pas suffisamment travaillé. Il peut être difficile pour lui de travailler en autonomie, il aimerait que je le regarde travailler : ça lui ferait un soutien psychologique… Mais d’une part, ça ne serait pas lui rendre service, et d’autre part, je n’ai vraiment pas que ça à faire, il m’est impossible d’y consacrer tout ce temps !
Son frère est davantage scolaire, même s’il n’a pas forcément envie de faire des dictées ou autres ! C’est donc beaucoup plus facile à gérer avec lui, même si parfois il nous fait aussi ses petites crises !
Pour ce qui est du niveau scolaire, s’ils étaient scolarisés ils seraient probablement parmi les meilleurs de leur classe. Je n’attends pas d’eux de sauter des classes, en revanche je leur demande de bien maîtriser le programme. Nous travaillons généralement avec des anciennes versions de manuels scolaires pour ne pas bénéficier des allègements successifs qui ont eu lieu ces dernières années pour les programmes scolaires. Le plus-parfait et l’accord avec l’auxiliaire avoir figurent à notre programme de primaire par exemple !
En plus du scolaire “formel”, nous faisons régulièrement diverses activités avec le groupe Facebook IEF Martinique. par exemple le showroom d’EDF sur la transition énergétique, le centre de tri des déchets de Ducos, la miellerie Saint Ange, les locaux d’A TV.
Si vous voulez connaître notre organisation en détail, n’hésitez pas à cliquer pour tout savoir sur notre fonctionnement en école à la maison.
Quelles démarches administratives particulières à votre mode de vie ne faut-il pas oublier ?
En vivant en voilier, on ne rentre pas dans les cases au plan administratif. J’ai utilisé une diversité d’adresses postales, entre une copine qui acceptait de recevoir mon assurance voiture à son domicile, ma mère qui recevait mes bilans médicaux, un prestataire les courriers officiels de la banque, l’URSSAF et autres… Mais au final ça n’a rien de bien compliqué, quoi qu’un peu fastidieux.
Comment gérez-vous les activités sportives et culturelles de vos enfants ?
Nos enfants font du golf toutes les semaines, et des stages sportifs ou culturels pendant les vacances. En parallèle nous avons de nombreuses activités ponctuelles, soit avec notre groupe de familles en école à la maison, soit avec des amis, soit en familles.
C’est important pour moi qu’ils aient des activités où nous ne sommes pas là, en revanche je n’ai vraiment pas envie de passer mon temps à faire le taxi pour les emmener à pléthore d’activités.
Comment socialisez-vous vos enfants ? Ont-ils beaucoup d’amis ? Les gardent-ils sur le long terme ?…
Nos enfants ont des copains et des amis, mais je n’irai pas jusque dire « beaucoup ». Mais est-ce un objectif ?
Ils ont « perdu » beaucoup de bons copains au fil du temps, nous avions ceux qu’on fréquentait en Méditerranée avant de transater, ceux qui habitaient en Martinique mais sont repartis sur l’hexagone, ceux qu’ils ont côtoyé à Grenade mais que nous n’avons pas revu depuis 18 mois du fait du Covid…
Ils ont plein de copains très temporaires, par exemple les enfants de nos clients avec qui ils s’amusent souvent beaucoup, ou ceux de familles en année sabbatique en voilier qu’on va recroiser plusieurs fois tout au long de leur année. Et quelques copains plus stables dans la durée, que ça soit nos copains à terre (voir ici l’article d’Ethan sur l’anniversaire de son amie Véronique à Parkadonf), les familles en école à la maison, et les enfants qui font les mêmes activités qu’eux (golf notamment).
Combien de temps passez-vous en vacances ? Avec ou sans enfants ? Partez-vous à l’étranger dans le cadre de vos vacances ? Avec ou sans enfants ?
Depuis que nous vivons sur le bateau, nous n’avons plus vraiment de notion de « vacances ». Nous sommes parfois rentrés voir nos familles. Lorsque nous sommes en saison cyclonique et que nous descendons mettre le bateau à l’abri (Saint Vincent, les Grenadines, Grenade), nous ne travaillons pas car nous ne sommes pas autorisés à travailler, ce n’est pas l’Europe.
En revanche j’en profite pour faire les travaux de fond sur le marketing, par exemple refaire notre site internet. C’est aussi là qu’on sort le catamaran de l’eau pour le caréner, ce qui nous occupe à temps plein pendant une semaine complète. C’est également l’occasion pour nous de faire des grands travaux d’entretien du bateau, par exemple refaire une chambre, des vernis, etc. Et pendant ce temps-là, je continue bien sûr à répondre aux mails et appels clients, envoyer des devis, gérer les déclarations de TVA…
En revanche sur ces périodes je dispose de beaucoup de temps libre, je vais toutes les semaines randonner, courir, faire du VTT. Nous allons à la SPA avec les enfants pour faire du bénévolat avec les chiens et chats du refuge. C’est donc d’une certaine façon des vacances !
Pensez-vous que vous profiteriez plus de vos enfants en menant une vie plus classique ?
Je voyais beaucoup moins mes enfants grandir dans mon mode de vie précédent, plus classique, où mon mari et moi partions travailler chacun de notre côté pendant que nos enfants allaient à l’école. C’est une évidence, et c’est ce qui nous a motivés à changer de vie : mission accomplie à ce niveau-là !
Est-il plus difficile de faire garder ses enfants quand on mène ce genre de vie ?
Nous faisons très rarement garder nos enfants. Ils sont capables aujourd’hui de rester sur le bateau en autonomie si je pars plonger en amoureux avec mon mari par exemple.
Parfois ils sont partis sans nous retrouver leurs grands-parents en métropole, et là nous étions sans enfant pendant 2 semaines complètes, mais ce n’était pas notre objectif, cela ne me manque pas.
En revanche mon mari gère souvent seuls les enfants quand je me fais des activités à terre (yoga, soirée avec des amis, randonnée, etc.), et ça en revanche, c’est indispensable à mon équilibre !
On me demande souvent si ça n’est pas trop de promiscuité de vivre à 4, travailler ensemble et faire l’école à la maison. De fait, chacun de nous 4 a des besoins de liberté et d’autonomie différents en quantité et en qualité. Les respecter nous permet de tous trouver notre équilibre. De mon côté j’ai besoin de temps sans mari et sans enfant, que cela soit pour pratiquer du yoga, des soirées avec des amis, etc. J’apprécie par exemple d’avoir des moments seule sur le bateau de temps à autres, par exemple quand mon mari et les enfants partent faire des courses dans les magasins de bricolage et autres. Par moment je fais des méditations avec l’application Petit Bambou, seule à l’avant du catamaran le soir, avec mon casque sur les oreilles. Et lorsque je ferme la porte de ma chambre, que ça soit pour lire ou me reposer, cela signifie “mis à part si le bateau brûle, personne ne vient me déranger” !
J’ai aussi besoin de temps où je suis avec seulement une partie de ma famille (uniquement un enfant, les deux enfants, mon mari : on varie !). Enfin, j’ai besoin personnellement de passer beaucoup de temps à terre (hors du bateau), seule ou avec des membres de ma famille, que ça soit pour randonner, voir du monde, visiter de nouveaux lieux, ou autre.
Pensez-vous que vous vous en sortiriez mieux financièrement en menant une vie plus classique ?
Nos métiers précédents étaient davantage rémunérateurs. Nous avons fait un choix vers davantage de simplicité, de sobriété. Cela me convient : on parvient à entretenir le voilier et à remplir le frigo, c’est parfait ! Heureusement qu’Olivier a de l’or dans les doigts pour entretenir notre bateau !
Pensez-vous que vous avez un meilleur, un moins bon ou le même état de santé en menant cette vie ?
Je suis convaincue que nous avons un bien meilleur état de santé, avec une vie au grand air, pas mal de temps consacré au sport, un temps de sommeil plus long que dans nos vies de terriens et davantage de temps pour jouer, farnienter, câliner nos deux lapines.
Nous sommes très vigilants pour protéger nos peaux au maximum du soleil car aux tropiques il est très agressif. Nos copains nous surnomment le gang des « T-shirts, chapeaux, lunettes », mais malgré tout nous sommes forcément plus exposés que les familles vivant sur l’hexagone.
Avez-vous un régime alimentaire particulier ? Est-ce plus facile ou plus difficile d’élaborer des repas dans votre situation ?
Nous mangeons très peu de viande et de poisson comparativement aux moyennes françaises. C’est un choix personnel lié à la fois au changement climatique et à notre santé.
Sur les hautes périodes touristiques comme pendant les vacances de Noël, il est plus difficile de bien manger car nous n’avons tout simplement ni le temps ni l’énergie de préparer des bons repas. Le midi, on va parfois grignoter une boîte de conserve ou une soupe toute préparée : nul n’est parfait !
En dehors des périodes de grand rush, je vais chaque semaine récupérer un panier de légumes de Permamiam, une productrice qui fait de la permaculture : l’occasion de manger local, de saison, sans pesticide, sans chlordécone, sans emballage, et de faire vivre des producteurs qui travaillent la terre ici.
En saison cyclonique, à Grenade, nous n’avons pas le droit de travailler : c’est beaucoup plus simple de bien manger quand on a facilement du temps à y consacrer ! J’ai aussi une agricultrice là-bas à qui j’achète mes produits frais.
J’ai pris le temps de consulter une naturopathe l’an dernier pour diminuer davantage les produits d’origine animale et renforcer significativement notre consommation de légumineuses et d’oléagineuses : ce coup de pouce m’a été bien précieux !
Actuellement j’essaie d’introduire une ou deux recettes vegan simples dans nos menus de la semaine, je trouve ça intéressant à explorer au plan culinaire, gustatif, éthique, santé et bien-être. Cela ne m’empêche pas de faire une raclette quand j’en ai envie, ne vous inquiétez pas pour moi !
N’hésitez pas à cliquer ici si vous voulez en savoir plus sur notre alimentation en bateau.
Combien de temps passez-vous aux tâches ménagères et à l’intendance ? Pensez-vous que vous y passeriez plus ou moins de temps en menant une vie plus classique ?
C’est un point qui m’a surpris quand on a emménagé en bateau : c’est beaucoup plus lourd ! Je n’avais pas mesuré qu’il faudrait préparer trois repas par jour. Dans notre organisation actuelle, je gère tous les déjeuners et mon mari tous les dîners : heureusement car sinon je n’aurai franchement pas l’énergie de cuisiner de bons repas.
Qu’est-ce qui vous plaît dans cette façon de vivre ?
Il y a tellement de choses à dire que je ne sais pas par où commencer !
Le plus important pour moi c’est d’avoir du temps de qualité en famille. Nous ne sommes pas ensemble juste 1h le soir, où on doit faire en speed les devoirs, la douche et cuisiner rapidement quelque chose. On se connaît, on respecte les particularités de chacun, nous essayons d’être à l’écoute des besoins de tous et de partager des bons moments.
Je pense qu’en second plan se situe l’Instruction En Famille. Au départ, je voyais cela comme une nécessité liée à notre mode de vie itinérant. Aujourd’hui j’estime que cela participe grandement du niveau de bonheur de mes enfants, du mien, et de notre qualité de vie à tous les 4.
J’aime beaucoup aussi la vie au grand air, en extérieur, proche de la nature. C’est un vrai besoin pour moi, et je pense que les randonnées, plongées, balades en paddle n’y suffiraient pas. Me réveiller et admirer les tortues respirer autour du bateau de bon matin, m’extasier devant les lumières d’un coucher de soleil ou la taille d’un arc-en-ciel font partie de mon « carburant ».
J’apprécie également la « sobriété » de nos vies. Nous sommes plutôt éloignés de la société de consommation, des guerres de l’image pour avoir une belle voiture, une grande maison ou les chaussures les plus à la mode. Mon plus grand trésor, c’est le temps. J’aime avoir du temps à ne rien faire, à m’ennuyer, à écrire, à lire, à regarder mes enfants jouer ou les écouter rire, à repenser aux discussions que j’ai eues avec des amis, à fantasmer sur un bon repas prévu pour le dîner… Je n’ai jamais compris les jalousies, quelles qu’elles soient : chacun essaie de vivre sa propre vie, suivant ses critères, à sa propre façon. Et fort heureusement, nous n’avons pas tous les mêmes attentes, les mêmes envies, le même rythme et les mêmes besoins !
J’ai regardé brièvement les photos d’un mois passé à Grenade, je vous en mets quelques-unes f ci-après : même quand l’un d’entre nous est malade, on profite les uns des autres et nous sommes là pour les autres. Ca n’a pas de prix !
Qu’est-ce qui vous déplaît dans cette façon de vivre ? Est-ce qu’il y a des choses qui vous manquent ?
Les 4 derniers mois ont été très (trop ?) chargés pour moi, entre l’achat, l’aménagement et la commercialisation de l’appartement, mes missions de consulting, les sorties du catamaran, le bateau-logement, l’école à la maison, nos sorties « plaisir » et la visite de nos amis et familles. Nous avons toujours eu des rythmes très changeants, mais là je ressens vraiment le besoin de trouver davantage de temps à partager des moments sympathiques avec mes enfants et mon mari. J’ai consacré beaucoup de temps au travail et cela m’a laissé moins de disponibilité. Il n’y a rien de bien grave, je sais que ma boussole c’est la qualité de ma vie de famille. En même temps j’avais vraiment très envie de pouvoir reprendre quelques missions de consulting, cela me nourrit intellectuellement. Tout est question d’équilibre, et il se construit progressivement au fil des mois et des années !
Une chose qui me déplaît est le peu d’amitiés que nous avons liées en Martinique jusqu’ici, où nous avons fait beaucoup de rencontres qui ne sont pas allées aussi loin que nous l’aurions souhaité. Cela viendra peut-être au fil des années, qui sait ?
Je regrette aussi notre faible présence auprès de nos amis restés sur l’hexagone. J’ai conscience de ne pas voir grandir le fils de ma meilleure amie : je ne l’ai vu qu’une fois depuis sa naissance, et il est déjà en Petite Section… Mais je n’ai pas le don d’ubiquité, et c’est inéluctable avec un choix de vie tel que le nôtre. Heureusement que les moyens modernes de communication rendent possibles beaucoup de choses, mais ça ne remplace pas la proximité physique !
Dans 10 ans, pensez-vous que vous mènerez toujours ce mode de vie ? Qu’en disent vos enfants ? Est-ce qu’eux-mêmes voudront mener cette vie quand ils seront adultes ?
Je pense que nous aurons probablement envie de changer de vie quand les enfants seront au lycée, ou alors pendant leurs études supérieures. Pour l’instant cela nous plaît beaucoup et nous trouvons tous les quatre notre équilibre dans ce mode de vie.
Je ne sais pas vers quoi nous irons. Je pense parfois au Canada car je suis fan des grands espaces sauvages, du contact avec la pleine nature. Je suis sûre que les choses vont mûrir en temps et en heure !
Comment envisagez-vous votre retraite ?
Je ne peux pas vous dire dans quel endroit du monde nous serons, mais une chose est sûre, j’ai besoin du contact de la nature et de moments de vie au grand air.
Et si c’était à refaire ? Feriez-vous la même chose ? Qu’est-ce que vous changeriez ?
Je ne m’étais jamais posée la question, mais franchement je crois que je referai quasiment tout pareil !
Il y a peut-être marginalement des tous petits détails, mais c’est tellement anecdotique !
Par exemple nous avons commencé l’école à la maison en s’appuyant sur les cours de Ker Lann les 3 premières années, et je pense qu’on aurait pu les lâcher au bout de 2 ans pour basculer plus vite sur les manuels scolaires. De la même façon initialement nous proposions de l’hébergement sur notre catamaran, nous avons arrêté au bout de 4 ans, on aurait peut-être pu / dû arrêter un an plus tôt pour avoir plus vite davantage d’intimité et de temps de qualité en famille.
Je me rends compte à écrire ces lignes que nos choix sonnent vraiment très juste pour nous, ce sont vraiment des micro-détails !
Quels conseils donneriez-vous à une famille qui souhaiterait mener ce genre de fonctionnement ?
Je suggèrerai surtout de se fixer une date de départ et de s’y tenir. Nous croisons parfois des familles qui auraient souhaité partir sur une année sabbatique mais n’ont pas concrétisé leur rêve, et je trouve ça dommage. Si vous sentez que ça vous fait vibrer, lancez-vous !!!
Comme le disent nos amis latinistes, « Festina lente »
, « Hâtez-vous lentement » : ne prenez pas trop de temps à peaufiner des menus détails, mais ne vous laissez pas tromper par de fausses excuses !
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